
Chez joca seria
Vues et lieux d’un département (Nantes et Saint-Nazaire, notamment).
Fragments, en lien avec ces lieux, d’un roman familial. Bribes aussi d’une histoire personnelle (grandir, militer, étudier, enseigner, vieillir).
En contrepoint, extra-départementale, une traversée du vingtième siècle. Pêle-mêle au générique : un aïeul aède au camp de Wittenberg en 14-18 ; les Surréalistes à Nantes ; deux chefs de gare, l’un communiste à Commequiers (Vendée), l’autre admirateur de Tolstoï à Astapovo (Russie) ; des étudiants “s’établissant” en 68 ; Sartre et Louis de Funès ; une grand-mère Suzanne experte en zizanie domestique ; un syndicaliste d’Indret devenu agent du Komintern ; Pascal Quignard à Ancenis ; un poète très local honoré à La Plaine-sur-Mer ; une huppe ordinaire ; un écrivain soviétique dont on compulse les archives dans une grande ville de Sibérie…
Également, une recette peu orthodoxe de lamproie ; une visite guidée des toilettes du Lieu Unique (à Nantes) ; des considérations sur le rugby ; d’autres sur la littérature, la philosophie, la musique ; une tentative pour penser, à partir de Vallès, ce que pourrait bien être un luxe pastoral et pour tous… »
J.-Cl. P.
Jean-Claude Pinson
Pourtant, n’est-elle pas, séculairement, cette poésie, une alliée privilégiée de la Nature, liée à elle par ce qu’on pourrait appeler un « contrat pastoral » ? Et, en sa langue même, en son désir de chant, le poème ne dessine-t-il pas, discrètement autant qu’obstinément, la possibilité d’une autre habitation de la terre et du monde ?
> Jean-Claude Pinson sait lire Wittgenstein, Leopardi et Marcel Proust comme il aime écouter John Coltrane ou Ornette Coleman. Suite de proses autobiographiques et mouvementées dans lesquelles le « barrage contre le Mélancolique » présente quelques failles, Free Jazz est un livre aussi agréable à l’esprit qu’à l’œil. Une belle leçon d’intelligence sensible et musicale.
Patrick Kéchichian, Le Monde
> Variations sonores et parfois trébuchantes, reprises incessantes au grand tissu où se confondent les mots pour (faire) chanter la vie et la vie pour (faire) chanter les mots, Free Jazz est un livre passionnant, qui s’autorise de longues plages confinant aussi bien à l’essai – ou plutôt ce qu’il en resterait une fois tout oublié de l’histoire du jazz – qu’à la confession.
La Quinzaine littéraire
Igor Gouberman
traduit du russe
par Julia Holter
et Jean-Claude Pinson
Vladimir Aristov est l’un des acteurs majeurs du courant dit « méta-réaliste » qui, apparu au début des années 80, a profondément renouvelé la poésie russe. L’originalité de la poésie d’Aristov n’est pas sans rapport avec sa formation de mathématicien. Elle repose en effet sur la prise en compte d’une réalité multiple, susceptible d’être appréhendée selon divers niveaux, à l’instar de ce qu’enseignent les géométries non-euclidiennes. D’où l’importance chez lui de la métaphore, non tant comme poétique de l’image, que comme outil rhétorique susceptible de porter au langage la pluralité infinie du réel. Loin d’être absconse, sa poésie est cependant toujours très concrète, parce que soucieuse d’explorer les circonstances et d’en éclairer tous les plans. C’est en particulier une poésie des lieux, attachée à en inventorier les plus secrets recoins.
il y a, gratte-ciel éclairé par en bas,
se découpant, la flèche de l’hôtel « Ukraine »
et, tendre, réprouvée,
une clarté plus qu’automnale
[…]
Va, dauphin,
Ignore mots et lettres,
Nage dans les rouleaux des éviers des appartements.
Jusqu’à ce que l’eau arrive
Dans les douches nocturnes désertées.